Visite guidée de l’exposition virtuelle «Les vitrines»
«Les vitrines» est un corpus de 13 sérigraphies réalisées par Michel Leclair en 1973 et 1974. La série a d’abord été exposée sous le titre Art à vendre, à la galerie Média gravures et Multiples, en mai 1974. Depuis ce jour, la série n’a cessé de susciter l’intérêt du public et des historiens d’art car elle porte un projet social, historique et artistique fort et toujours d’actualité !
Go Art vous propose de découvrir les 13 vitrines de Michel Leclair dans un parcours parfois commenté par l’artiste, parfois décrit par des historiens et des critiques d’art. Bonne visite !
Conversation entre Johanne Gaudet ,commissaire de l’expo et l’artiste Michel Leclair
J.G.: Veux-tu avoir mon portrait !, est-ce un panneau publicitaire ou une vitrine ?
M. L. : C’est en effet un panneau publicitaire sous vitre, accroché au mur d’un autre commerce. Ni vitrine, ni feuillet promotionnel, entre les deux. Je l’ai sélectionné malgré tout parce que c’était courant à l’époque (il y a 50 ans) que les professionnels fassent ainsi la promotion de leurs services. Je l’ai d’ailleurs repéré parmi les commerces de la rue Sainte-Catherine où plusieurs photographes avaient pignon sur rue et affichaient leurs productions de la même manière qu’un commerce de fleurs ou de vêtements. Ils offraient leurs services au studio ou à l’extérieur pour les événements significatifs de la vie ordinaire : mariage, première communion, graduation, cartes d’affaires, passeports.
J.G.: Quelles réflexions cette vitrine-là, en particulier, a-t-elle suscité sur ta pratique artistique, sur l’art et peut-être sur la commercialisation de l’art ?
M.L : En voyant ce panneau, j’ai établi un lien personnel entre ce photographe professionnel et moi, artiste photographe. Faisions-nous le même métier ? Et puis, quels produits étaient mis en vente : à la différence des autres vitrines qui présentaient des objets de consommation, celle-là faisait l’étalage de vrais individus, peut-être des amis, des voisins qui souriaient aux passants et constituaient, en quelque sorte, la carte de visite du photographe ! Faisions-nous vraiment le même métier ?
Quel est le propos de «Les vitrines» ? Pour un, la série revisite les notions de reflet et de nature morte, deux genres en histoire de l’art. Par exemple, les vitrines photographiées et imprimées par Michel Leclair proposent une nouvelle vision de la nature morte, une vision contemporaine de ce genre. Aux fruits, fleurs, vases et chandeliers d’une autre époque, l’artiste oppose des objets de consommation banals mais glorifiés par une mise en vitrine soignée, voire élégante.
Dans cet esprit, Michel Leclair élabore la série «Les vitrines» comme un projet social dans la mouvance des artistes du Pop Art dont les oeuvres commentent et critiquent le consumérisme. Pensons à la sacralisation des boîtes de soupe Campbell de Andy Warhol !
Enfin, la production de la série «Les vitrines» est un geste artistique qui appelle à la démocratisation de l’art. À l’origine de ce mouvement, le désir que les oeuvres en art visuel sortent des salons et des musées et que les rues se transforment en galeries à ciel ouvert ! Il s’agit pour les artistes de décoder l’esthétisme qui se dégage de certains éléments du paysage urbain – composition, couleurs, graphisme, lettrage – et d’inviter les gens à poser un tel regard sur leur environnement. L’art dans la rue.
La série «Les vitrines» a connu un vif succès auprès des critiques et des amateurs d’art. Aujourd’hui, le travail de Michel Leclair est considéré comme une contribution unique et singulière à l’histoire de l’art du Québec.
L’exposition Les vitrines se poursuit. Cliquez ici pour voir la suite.