Un savoir à partager

Un savoir à partager

De Johanne Gaudet, directrice de la galerie Go Art| 2024-10-11T16:41:47-05:00 10 octobre 2024|Actualités|

Le catalogue raisonné des oeuvres de l’artiste Louise Robert est en ligne, accessible à tous et sans frais. La publication met en lumière les 50 ans de carrière de l’artiste avec la recension de plus de 1 600 oeuvres et 450 expositions. On navigue avec plaisir à la découverte des documents d’archives, des articles de journaux, des photos de l’artiste dans son atelier, des catalogues d’exposition.

Après sept (7) ans de recherche en toute complicité avec l’artiste, l’auteur, Michel Huard, est fier de nous offrir cet outil important pour l’histoire de l’art du Québec.

www.louiserobert.ca

Johanne Gaudet : Ceux et celles qui ont consulté ton catalogue parlent d’un outil colossal et indispensable. Pourquoi ce catalogue raisonné fait-il cet effet ?

Michel Huard : Les catalogues raisonnés (CR) sont importants, voire indispensables, d’abord et avant tout pour leur aspect scientifique.  Un CR est la référence absolue sur la production d’un.e artiste et seuls les responsables peuvent attester l’authenticité des oeuvres de l’artiste concerné.e.

Le premier catalogue raisonné a été créé par un marchand d’art au XVIIIe siècle, avec l’objectif d’en faire un outil de référence pour les oeuvres qu’il vendait. Cette vocation a évolué et l’outil s’est adapté. Le CR que j’ai produit, par exemple, est bien ancré dans son époque, notamment par la place qu’il accorde à l’histoire de l’art et par le recours aux technologies de pointe en matière de catalogage. 

Un des ancrages du CR dans son époque, par exemple, est de reconnaître la place des femmes artistes en mettant en ligne le tout premier catalogue raisonné d’une femme artiste au Québec et au Canada.  Un autre élément de modernité est son accessibilité :  le catalogue en ligne donne accès à tout le monde et sans frais, à l’entièreté de la production de l’artiste; c’est également une porte ouverte sur l’histoire de l’art car les expositions et les publications qui y sont présentées parlent autant de l’artiste, Louise Robert, que de ses contemporains.

Enfin, nous avions la volonté, Louise et moi, de créer une plateforme que pourraient emprunter les artistes et les chercheurs pour leurs propres besoins de catalogage. Partage et réseautage, nous avons souhaité jouer un rôle d’influenceur, voire d’assistanat, auprès de la communauté artistique pour favoriser la multiplication des CR et accentuer ainsi le partage de connaissances sur nos artistes et sur leurs productions.

Louise Robert et Michel Huard dans l’atelier rue De Bullion. Photo :Jacques Payette, septembre 2022

JG : Ta recherche a duré sept (7) ans.  Quels facteurs ont été déterminants pour l’aboutissement du projet ?

MH: Il faut beaucoup aimer l’art et l’histoire de l’art pour persévérer dans ce type de projet à long terme !  Je savais que j’étais un coureur de fond, j’ai aussi appris que j’étais un excessif (rires), dans le sens où j’ai le désir, et la volonté, d’aller jusqu’au bout d’un projet, d’être le plus précis possible avec toute l’information requise.

J’ai eu la chance de côtoyer Louise tous les jours pendant six ans, et ce n’est pas une figure de style : des messages par textos et des courriels, des coups de fil, des visites et du travail à son atelier et chez elle. J’ai goûté à sa fidélité et à son amitié.

Louise Robert était aussi passionnée que moi par le projet, bien que la recherche brassait de nombreux pans de sa vie d’artiste et de sa vie personnelle. Parfois, des images, des publications, des articles de journaux ravivaient sa mémoire à propos d’événements qu’elle avait oubliés ou choisi d’oublier (rires), il y a eu de nombreux moments d’émotion vive. Louise était possédée par son art, son amour de la peinture, de la littérature et de la poésie. Ses nombreux carnets de notes le démontrent, ses collaborations avec des poétesses aussi.

Amour de l’art, fidélité et complicité sont assurément des facteurs qui ont favorisé la réussite du projet.

JG: On a l’habitude de voir des catalogues publiés en livres imprimés. Est-ce que le milieu de l’art, les chercheurs, les historiens, les collectionneurs ont appuyé ton projet de fabriquer un CR en format numérique ?

MH: Au départ, il y a eu des résistances et du scepticisme. Peu à peu, les institutions ont confirmé leur intérêt et, à mesure que le catalogue prenait forme, les collaborations se sont multipliées. Du côté des collectionneurs, des galeristes et des chercheurs, iels ont tous été réceptifs à la publication numérique et ont encouragé sa concrétisation. Aujourd’hui, je sens de l’enthousiasme auprès de tout le milieu de l’art. Reste à convaincre les organismes subventionnaires car ils sont encore peu enclins à soutenir la réalisation de catalogues raisonnés, qu’ils soient publiés en version papier ou en format numérique.

JG: La richesse du CR, c’est qu’il est accessible à tous. Peux-tu nous guider dans sa découverte et son appropriation ?

MH: Je pense que le CR est une mine d’or pour les collectionneurs, les amateurs et les curieux. Qui que vous soyez, vous pouvez découvrir en images toutes les oeuvres de l’artiste et suivre l’évolution de son travail esthétique. Et puis, la publication vous permet de naviguer selon vos goûts et vos préférences:  par domaine de création (peinture, dessin, estampe, etc.), par technique (huile, pastel, crayon de couleur, etc.) et par décennie. Ce sont différentes façons d’entrer en contact avec les oeuvres et de les apprécier.

De plus, une publication numérique peut être mise à jour régulièrement, au fur et à mesure de la parution de nouvelles informations sur les oeuvres. Les amateurs peuvent donc consulter le CR plusieurs fois et faire des découvertes à chaque fois. Un exemple : je travaille présentement à compléter une section intitulée «Ateliers de l’artiste» laquelle réunit des photos et des notes sur les nombreux ateliers où Louise a travaillé. D’autres sections sont aussi en élaboration, notamment «La bibliothèque de l’artiste» et «Archives Louise Robert».

Louise Robert dans son atelier, rue Wellington à Montréal. 1980

JG: Est-ce que ton expérience a modifié ta façon de voir la diffusion des connaissances en histoire de l’art ?

MH: J’ai crû dès le départ aux vertus de cet outil pour la recherche et, peu à peu,  j’ai compris son énorme potentiel pour la diffusion.

La construction d’un logiciel sur mesure avec les usages ordinaires de l’internet permet de structurer différemment la communication du savoir, un des paramètres les plus importants dans le monde de l’art, aujourd’hui.

Le recours au numérique ouvre un large espace de réflexion à explorer quant à la multiplication des avenues de recherche que ce soit, par exemple, grâce à l’indexation numérique, aux échanges de bases de données entre systèmes et appareils informatiques, toutes des opérations  qui permettent la circulation des œuvres dans le monde et enrichissent le travail des acteurs du milieu de l’art.

Appel à contribution: le catalogue raisonné de Louise Robert a besoin de votre collaboration. Si vous possédez une oeuvre de l’artiste et que celle-ci n’est pas répertoriée, vous êtes invité.e à communiquer avec Michel Huard. Merci !

contact@louiserobert.ca