Artiste prolifique dans plusieurs disciplines – dessin, sculpture, peinture, graphisme et orfèvrerie – Denis Juneau s’inscrit dans la mouvance des artistes plasticiens, tout en développant son propre langage vis-à-vis de l’abstraction géométrique. L’artiste explore la matière, touche à l’art optique et, avec un sens du ludique, s’associe au spectateur pour jouer à la re-création de ses œuvres.
Denis Juneau est né à Verdun, au Québec, en 1925. Il étudie les arts au Monument-National et à l’École des beaux-arts de Montréal où, de 1943 à 1950, il reçoit les enseignements d’artistes aussi réputés que Sylvia Daoust, Alfred Laliberté et Alfred Pellan.
Façonner l’espace En 1954, lorsqu’il reçoit de la Commission scolaire de Verdun la commande de créer une statue monumentale en marbre, il part à Milan suivre une formation en graphisme et en design industriel. Mis en contact avec les règles du design moderne en matière d’intégration de l’art à l’environnement, il réalisera, dans les années 1960, une dizaine de sculptures en béton et en métal, destinées à façonner l’espace public où elles sont érigées – écoles, parcs, édifices publics. Quant à ses études en graphisme, elles lui permettent de créer le célèbre logo de l’Université de Montréal, le U majuscule surmontant un M stylisé.
Art cynétique, art ludique Denis Juneau poursuit sa carrière de peintre en s’associant plus étroitement à la deuxième vague des peintres plasticiens. En 1959, sa participation à l’exposition l’Art abstrait marque son entrée officielle sur la scène artistique aux côtés des Molinari, Tousignant, Leduc.
Bien qu’il adhère aux concepts des plasticiens, Denis Juneau n’en fait pas moins le choix de créer des œuvres à la portée de tous, où l’aspect ludique, le goût de la surprise et de l’inattendu l’emportent sur le formalisme et la sévérité des formes. Il fait également un effort pour inviter les spectateurs à s’engager dans un processus actif devant une oeuvre, au-delà de la simple contemplation : parfois, c’est le regard qui produit un nouveau sens, parfois manipuler une œuvre lui donne une autre forme.
Dans une entrevue réalisée par Nathalie De Blois à l’occasion de l’exposition Ponctuations, en 2001, Denis Juneau dit : «Aujourd’hui je crois en la valeur de toutes les formes d’expression, figuratives comme abstraites, pourvu qu’elles soient ressenties et qu’elles expriment une authenticité. Ce qui me touche sincèrement, c’est tout art qui inspire un sentiment d’humanité.»
Denis Juneau était sourd-muet mais sa création n’a pas souffert de son handicap. Par contre, on peut croire qu’il n’a pas pu défendre sa vision artistique comme d’autres artistes de sa génération ont pu le faire. Depuis 2016, la Fiducie Denis Juneau promeut et protège son oeuvre.
Ce qu’ils ont dit de lui…
John Porter, historien de l’art, directeur honoraire du Musée national des beaux-arts de Québec :
«Membre de la seconde génération des Plasticiens, Denis Juneau est l’une des figures essentielles de l’abstraction géométrique au Québec. A sa manière, Juneau est un mathématicien de la ligne et du cercle et un amoureux de la couleur..»
PORTER, John, «Denis Juneau», denisjuneau.com, Fiducie Denis Juneau, 2016
Hélène Lamarche-Ouellet, historienne de l’art : « Le tableau n’a donc de repos que lorsque l’on cesse de le regarder. Pour Juneau, l’utilisation des principes de l’art optique à une telle fin, outre l’intérêt de la recherche picturale pure, est une façon subtile de faire du spectateur non plus un être passif mais celui qui participe par son regard à un geste créateur sans cesse renouvelé.» LAMARCHE-OUELLET, Hélène, «Denis Juneau et l’activité des formes / Denis Juneau and the Activity of Forms», Vie des arts, vol. 21, no.84, Automne 1976, p. 22-25 et 89-90.